La jeune fille à la perle de Tracy Chevalier

9782070417940

Folio, 313 pages, 7,70€

4ème de couverture

La jeune et ravissante Griet est engagée comme servante dans la maison du peintre Vermeer. Nous sommes à Delft, au dix-septième siècle, l’âge d’or de la peinture hollandaise. Griet s’occupe du ménage et des six enfants de Vermeer en s’efforçant d’amadouer l’épouse, la belle-mère et la gouvernante, chacune très jalouse de ses prérogatives.Au fil du temps, la douceur, la sensibilité et la vivacité de la jeune fille émeuvent le maître qui l’introduit dans son univers. À mesure que s’affirme leur intimité, le scandale se propage dans la ville…

Résumé

Griet aide sa mère à la cuisine quand elle reçoit la visite d’une femme et de son époux. L’homme ne lui adresse la parole que pour comprendre pourquoi elle trie les légumes de la soupe par couleur. On sent que cela à une importance pour lui que ne comprend pas Griet ou le lecteur. La mère de Griet lui apprend qu’elle doit entrer au service de ces personnes le lendemain. Depuis l’accident de son époux, elle a besoin d’une aide financière que lui apportera Griet. Cette dernière apprend qu’elle rentre au service du peintre Vermeer, mais surtout de son épouse et de leurs nombreux enfants. Commence alors pour la jeune fille, une vie nouvelle, différente et qui va lui réserver des surprises…

Mon avis

Une belle découverte !

Ce livre n’est pas un coup de cœur mais je l’ai beaucoup apprécié. Je l’ai lu, il y a plus d’un mois, et j’en garde un excellent souvenir.

L’action commence en 1664 et le lecteur découvre Griet, une jeune fille de 16 ans (si je ne me trompe pas). C’est elle qui nous raconte son histoire. Un matin comme un autre, sa famille reçoit la visite d’un couple, une femme grande et assez sophistiquée, au ton abrupt et un homme, plus petit, qui semble vivement intéressé par la manie de Griet pour le tri des légumes de couleur. Un couple bien singulier. La mère de Griet lui apprend qu’elle va rentrer à leur service le lendemain pour 8 florins la journée et que désormais elle logera chez eux, dans le Coin des Papistes. C’est un coup dur pour Griet mais encore plus pour sa petite soeur Agnès qui ne pensait pas être séparé de sa seule confidente si tôt. Mais Griet comprend, depuis que son père est devenu aveugle, il ne peut donc plus travailler. Et la vie est difficile, les mois sont durs. Son père lui apprend qu’elle va travailler pour le peintre Vermeer et son épouse. Elle devra principalement faire le ménage de son atelier.

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Débute alors une toute nouvelle vie pour la jeune Griet, nous apprenons quelles seront les taches qu’elle devra exécuter en tant que servante, mais surtout nous découvrons avec elle la famille Vermeer et son maigre personnel. Une galerie de portraits très bien croqués par Tracy Chevalier. De Catherine, l’épouse enceinte de son 6ème enfant à Maria Thins sa mère propriétaire de la maison, en passant par les 4 fillettes donc l’insupportable Cornélia, Tanneke fidèle servante de Maria, et bien sur, Johannes Vermeer le peintre et marchand de tableau, chef de famille. Un nouveau monde de dur labeur, de mise en garde, de sournoiserie, de méchanceté parfois, mais de lumière aussi, de couleur et de beauté.

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Griet va devoir s’adapter à ses nouvelles tâches mais aussi conjuguer avec le caractère de Tanneke, qui la voit un peu comme une ennemie et une bonniche dénichée on ne sait où; ou encore avec celui de sa maitresse assez particulier. Et puis, surtout il y a le ménage dans l’atelier du maitre, comment le faire sans rien déplacer ? Et il est tellement secret. Peu à peu, Griet va se faire une drôle de place dans l’univers de ce peintre qui peint peu et lentement. Elle est attachante. Souvent, j’éprouve des difficultés avec les récits à la première personne, mais ici, ça sonne juste, et j’ai trouvé cette petite servante loin d’être agaçante. Elle n’a pas que des qualités (un soupçon de naïveté, une dose de fausse innocence)  bien sur mais elle fait de son mieux pour éviter les ennuis. Cette société du 17ème est tellement différente de ce qu’on connait de nos jours. Tracy Chevalier parvient à nous faire ressentir le mal être des personnages et les sentiments de  Griet : la tristesse, le doute, son mal aise en la présence du peintre. Cet homme qui l’impressionne, qu’elle admire et qui pourtant, lui adresse si rarement la parole. Puis progressivement, il la fait entrer dans son univers.

J’ai beaucoup aimé être immergé dans la ville à cette époque là, jusqu’au style flamand des constructions, le marché. On s’y croirait ! L’auteure a vraiment un don pour dépeindre les lieux sans abuser de lourdes descriptions. Nous retrouvons les us et coutumes de cette région dans les années 1660, l’opposition des quartiers catholiques / protestants, la prise des repas, les constructions, les travaux manuels (différents métiers nous sont exposés), l’accouchement et les traditions associés, la peste, … Le lecteur est vraiment immergé dans cette ville des Provinces-Unies (ce qui deviendra les pays-bas).

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J’ai beaucoup apprécié cet univers et de découvrir par le récit de Griet, le monde de la peinture, du moins celui de Vermeer. Les couleurs, les détails, l’immobilité, le mouvement, … L’auteure décrit ce quotidien tellement bien, avec le vocabulaire précis et soigné. Les descriptions et leurs impressions permettent au lecteur d’imaginer les peintures de Vermeer comme la vie de Griet dans le Delft du 17ème siècle.  J’ai adoré chercher et retenir dans les descriptions des peintures ou des anecdotes les éléments pour retrouver les vraies peintures ensuite sur le net, et on en a des évocations des toiles de Vermeer (j’en ai repéré au moins 9 sans compter la jeune fille à la perle !) !!! Et puis apprendre qu’il peignait quasiment toujours dans la même pièce, avec des éléments récurrents, en utilisant ses couleurs favorites,… c’est très intéressant.

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Ce qui va se passer au sein de cette maison ne sera pas sans conséquence sur la vie de Griet, mais en lisant la 4ème de couverture, je m’attendais à du scandale, à bien pire ! Sans raconter ce qu’il se passe, on en vient à découvrir une version potentielle de l’histoire de la naissance du fameux tableau représentant une jeune fille au turban ou encore « une jeune fille à la perle ». Et j’avoue que j’ai bien accroché moi à cette vision de l’auteur. Il est fort probable que tout cela n’est que pure fiction mais c’est amené de telle manière, que cela semble assez crédible. Du fait, du récit du pont du vue de Griet et du traitement de l’histoire, le peintre et son œuvre ne sont jamais dénaturé par le récit. Peut être que pour certains du coup, l’auteure ne prend pas de risque mais à moi, ça me convient très bien.

J’ai passé un très bon moment de lecture, dans une petite partie du monde des Arts, dans une époque plutôt méconnue dans un pays dont on parle peu dans les livres que je lis (et c’est dommage). Le livre parfait pour aborder les thèmes des servants et de leurs conditions, de l’innocence, de la peinture et de l’esthétisme. Il ne me reste plus qu’à trouver le temps de voir le film avec Colin Firth (<3) mais j’avoue avoir peur d’être déçue (et puis je ne suis a priori, pas convaincue pour Scarlett dans le rôle de Griet).

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