Le Nibelung – Tome 1 – Le carnaval aux corbeaux d’Anthelme Hauchecorne

carnaval

Editions du Chat Noir, 19,90€,

4ème de couverture

Ludwig grandit à Rabenheim, un petit bourg en apparence banal.
Claquemuré dans sa chambre, il s’adonne au spiritisme. À l’aide d’une radio cabossée, il lance des appels vers l’au-delà, en vue de contacter son père disparu.
Jusqu’à présent, nul ne lui a répondu… Avant ce curieux jour d’octobre.
Hasard ? Coïncidence ? La veille de la Toussaint, une inquiétante fête foraine s’installe en ville. Ses propriétaires, Alberich, le nabot bavard, et Fritz Frost, le géant gelé, en savent long au sujet du garçon. Des épreuves attendent Ludwig. Elles seront le prix à payer pour découvrir l’héritage de son père.
À la lisière du monde des esprits, l’adolescent hésite… Saura-t-il percer les mystères de l’Abracadabrantesque Carnaval ?

Mon avis

Coup de coeur  ❤

D’ailleurs comme à chaque coup de cœur, c’est super difficile pour moi d’en parler, j’ai tellement envie que les gens se ruent sur ce livre mais en même temps leur laisser la surprise de la découverte fabuleuse qu’ils ne manqueront pas de faire, que je ne sais comment aborder cette chronique.

Peut-être déjà en disant que je l’ai lu deux fois, une fois en bêta lecture à un stade assez avancée (la dernière si je me souviens bien) et j’avais adoré. Puis, une seconde fois où je l’ai reçu si gentiment par l’auteur. Et là, je m’étais dis « bon tu le lis vite comme ça fait pas un an que tu l’as lu » et … bien non, j’ai replongé dedans comme la première fois, c’était toujours aussi prenant, je voulais retrouver les détails (et les différences suite aux dernières modifications) et finalement j’ai pris mon temps pour le savourer une seconde fois. Et je crois bien que plutôt, je le relirai encore et que le plaisir sera toujours le même.

Car quelle ambiance ce carnaval,  j’en ai eu la chair de poule ! Je n’avais jamais envie de m’arrêter. Dès le début, j’ai eu envie de pousser les portes de cette semaine de Toussaint et de ses spectres. C’est vraiment une lecture pour cette saison-là mais pas que ! (On peut la lire à tout moment, pas de doute mais les soirs d’Octobre, la magie va se révéler un peu plus). L’intrigue est effrayante juste ce qu’il faut. Adapter à tous les publics et les tranches d’âge d’ailleurs. Ce n’est pas parce que l’histoire met en avant des adolescents que les adultes s’en trouveront chagrinés ou frustrés ! Parce que coté, adultes justement, forains notamment mais aussi membres de la communauté de Rabenheim, il y a de quoi faire ! Et quelle galerie de portraits ^^ On ne s’ennuie pas une minute entre les dialogues savoureux, la musicalité de l’écriture, la poésie et le joyeux macabre. Cette plongée dans l’Est et ses légendes est vraiment un petit bijou de fantastique.

Le carnaval aux corbeaux m’a fait penser aux récits et séries de mon enfance. Avec une teinte de pourritures et de sombrécumes en plus ^^  Le lecteur ressentira, à n’en pas douter, les influences artistiques d’Anthelme entre Edgar Allan Poe et Tim Burton, cet univers fantasque très imagé aux relents de pourriture saupoudré de merveilleux, très visuel et sonore pourrait facilement être adapté en conte animé ou en film pourquoi pas ^^
Encore une fois, je suis impressionnée par le style si travaillé de l’auteur. Cette façon de dépeindre les personnages, les lieux et les décors mais aussi de donner vie à ses personnages hauts en couleur, avec des joutes verbales mémorables entre les deux héros Ludwig et Gabriel et les autres personnages.  Quelle gouaille de nouveau. Il nous sert une histoire fascinante, à la fois drôle et sensible, mystérieuse et frissonnante avec un arrière gout sucré, aux odeurs fétides et nauséabondes; un mélange des genres et le gout des mots, une poésie, un conte, un imaginaire influencé certes (Poe, Grimm, Burton,…) mais qu’il réussit à rendre unique et original.

Je me suis attachée à Ludwig Poe ce garçon qui possède une sensibilité pour le paranormal mais surtout qui souffre de n’avoir pas connu son père et qui aimerait le retrouver. Sa relation avec sa mère est tendue mais on note aussi l’affection qu’ils se portent mutuellement. Le jeune garçon, régulièrement tête en l’air est aussi la tête de turc préféré des plus grands et surtout d’Otto. Heureusement, il y a Gabriel Grimm son copain, son opposé, presque aussi transparent que Ludwig est bizarre. Gabriel qui doit composer avec ses frères chahuteurs et ses parents qui traversent des difficultés financières. Parents qui voient d’un très mauvais oeil son amitié avec le fils Poe d’ailleurs. Quand un étrange carnaval s’installe en ville, Ludwig commence à recevoir des lettres de son père disparu acheminée par bien d’étranges façons. Il va tomber sur une fille encore plus bizarre et dérangée que lui. Le comportement des parents de Gabriel va changer aussi et ce dernier va fouiller un peu dans le passé familial. Ludwig et Gabriel vont vite se rendre compte que les apparences peuvent être trompeuses qu’elles concernent les étranges forains ou leur propres familles.
Je n’en dirais pas plus que l’intrigue. Mais le récit ne manquera pas de rebondissement, de révélations, de surprises et de coups bas.

J’ai beaucoup aimé les personnages secondaires également, Slike la petite peste dont la répartie est juste hallucinante ! Je n’ai pas toujours compris ses réactions mais ça fait tellement parti du personnage ^^ J’ai adoré détester Alberich, avec lui on ne sait jamais sur quel pied danser, est-il sincère ? Cherche-t-il à embrouiller Ludwig ? Est-il cruel ou juste aigri ? Dame Vala est aussi un personnage attachant dans son genre comme le géant Frost. L’Abracadabrantesque Carnaval est bien un personnage à part entière dont on découvre l’histoire qui ne manquera pas de faire frissonner les lecteurs sensibles.

Il ne faut pas avoir peur de vous lancer dans ce récit, c’est un tome 1 mais il y a bien une fin, la grande majorité des mystères sont levés et même je me demande ce que Le Nibelung nous réserve la prochaine fois ! Pas de doute pour moi, je me jetterai sur la suite A la Cour des nuits d’hiver (si je ne me trompe pas).

Cette histoire m’a donné envie d’approfondir les contes et les légendes du Nord ou de l’Est que je ne connaissais pas, le Nibelungen un peuple de nains légendaires de la mythologie germanique, l’Élivágar de la mythologie nordique ou encore le Schimmelreiter, inspiré de l’Homme au cheval blanc de Theodor Storm (mixé avec la Mort de Pratchett non ?) bref, toute une foule de légendes, de thèmes passionnants qui manquent les esprits et donne envie d’en connaitre, d’en savoir plus.

Un gros plus, pour cet ouvrage sorti dans la collection  Graphicat des Editions du Chat Noir sont les illustrations, la mise en page et la typographie très travaillée elle aussi. Pour avoir lu en béta lecture, je me demandais comment ça allait rendre et le résultat est magnifique. Je vous invite à découvrir les deux illustrateurs Loïc Canavaggia et Matthieu Coudray si ce n’est pas encore fait. Leurs illustrations rendent magnifiquement l’atmosphère du carnaval et de ses forains mais aussi de Rabenheim.

Je ne pense pas avoir dit la moitié du quart de ce que j’aimerai dire, si vous ne connaissez pas le talentueux Anthelme Hauchecorne, son écriture ciselée, précise et acérée et son univers sombre et poétique, coloré et brumeux (le joyeux macabre est un terme qui lui va si bien), Le carnaval aux corbeaux est idéal pour commencer. Le livre-objet est magnifique et vous ne verrez plus les corbeaux de la même façon après votre lecture ^^

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L’écume des jours de Boris Vian

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Lu en ebook

Le livre de poche (ou 10/18), d’occasion ou neuf (6,60€ actuellement), entre 190 et 350 pages selon les éditions

4ème de couverture (amazon, dernière édition)

Chick, Alise, Chloé et Colin passent leur temps à dire des choses rigolotes, à écouter Duke Ellington et à patiner. Dans ce monde où les pianos sont des mélangeurs à cocktails, la réalité semble ne pas avoir de prise. On se marie à l’église comme on va à la fête foraine et on ignore le travail, qui se réduit à une usine monstrueuse faisant tache sur le paysage.

Résumé

Colin, jeune homme charmant, qui ne travaille pas, amateur de jazz, reçoit à déjeuner son meilleur ami Chick, ce dernier est ingénieur et donc gagne mal sa vie, fan de Jean-Sol Partre,  tous les lundi et parfois d’autres jours aussi. Lors de leur dernier repas, Chick fait la connaissance du cuisinier de Colin, Nicolas, coïncidence, ce dernier est l’oncle d’Alise la fille dont Chick est amoureux. Colin est jaloux, lui aussi, il vaut être amoureux, à une soirée chez Iris, une amie commune, il rencontre Chloé…

Mon avis

Très mitigée.

Je sais que pour beaucoup ce livre a été un coup de cœur, que beaucoup l’adore, j’espère qu’ils me pardonneront mon avis. Je ne peux pas dire que j’ai détesté, comme je ne peux pas dire que j’ai aimé. Je n’ai simplement pas été touchée, même si certaines choses m’ont plu, d’autres me sont complètement passées au dessus de la tête. Il m’a manqué des clefs de compréhension, un contexte, une atmosphère particulière, je pense pour totalement accrochée. Et donc, … j’ai pas vraiment accrochée.

On découvre et on suit des personnages atypiques dans un monde « à l’envers », surréaliste. Notamment, le travail est quelque chose de mal vu et il est plus glorifiant (mieux vu, mieux payé) d’être ouvrier ou manuel comme le cuisinier de Colin qu’ingénieur. Colin ne travaille pas, il a de l’argent, il invente pour son usage personnel quelques machines comme le fameux piano-cocktail et il vit dans un grand appartement. Il jalouse Chick car Alise lui plait aussi mais ça n’est pas possible. Heureusement, il va rencontrer Chloé, belle et spontanée. En fait, il serait très facile de dépeindre les personnages (ce qu’ils portent, comment ils sont) mais il est presque impossible de dire ce qu’ils ressentent et, leurs qualités. Car le livre a été voulu comme ça, on ne sait presque rien des émotions des personnages. Ce sont les lieux, les décors, les actes qui est le reflet de ce qu’ils ressentent. Comme à l’instar de la maison de Colin qui change quand les finances de ce dernier s’amenuisent.

Et j’ai eu du mal avec cette façon de faire. Autant, j’ai apprécié les métaphores, les jeux de mots, les descriptions d’un monde complètement barré parfois, c’est très poétique et ça aime beaucoup, autant j’ai eu du mal avec les personnages, que je ne comprenais pas, auxquels je n’ai pas réussi à m’attacher parce qu’il n’avait pas assez de consistance, assez superficiels. Je pense que c’était voulu par l’auteur mais moi j’ai eu du mal. J’aurais du être triste de ce que subit Chloé mais finalement je n’ai pas été touchée. Idem, j’aurais du être révolté par la religion et sa façon de faire et être en empathie avec Colin, mais je n’ai pas su. J’ai même préféré les personnage secondaires aux héros…

J’avoue je suis allée chercher sur le net, des explications pour certaines choses, et avec ses dernières, je comprend mieux ce que voulait faire passer comme messages Boris Vian. Mais j’aurai bien aimé ne pas à avoir besoin d’éplucher les sites. Il y a des messages qu’on comprend facilement, le travail, la place de la femme, l’espoir, la souffrance, la maladie, … Mais il y avait tellement de messages qu’on ne peut tous les appréhender de la même façon, reste encore la religion, la passion, la superficialité, l’irréel, … J’adhère d’ailleurs pas mal aux idées mais au final j’ai eu comme une sensation de… fouillis. Et puis, il fallait connaitre un minimum l’auteur et ses aspirations pour comprendre certaines images, l’évocation des lieux, du jazz, etc. Et je suis certainement passée à côté de plein de choses.

Sinon, ça se lit très vite, les pages se tournent toutes seules. Le style est donc particulier, mélancolique, burlesque, surréaliste, c’est beau, c’est vrai. Pour un premier livre, c’était vraiment quelque chose, différent, interpellant, marquant.

Je suis restée sur ma faim, même si finalement, il n’était pas nécessaire de développer plus, vu la tournure des événements. Donc mitigée parce que j’ai aimé l’univers, la façon de voire les choses (émerveillement et merveilleux), l’histoire et ses messages. Mais pas les personnages, la rapidité des événements, les enchainements, les réactions,…

Voilà, donc, je suis contente de l’avoir lu, mais je ne sais toujours pas si j’ai aimé ou pas. La balance ne penche pas d’un côté ou de l’autre.

J’irai voir l’adaptation au cinéma, parce que je suis curieuse de voir la façon dont certaines choses seront montrées. Et parce que j’aime beaucoup Michel Gondry.

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