Firmin : Autobiographie d’un grignoteur de livres de Sam Savage

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Babel, 200 pages, 7€70

4ème de couverture

Autobiographie d’un grignoteur de livres, Firmin raconte l’histoire d’un rongeur érudit qui a vu le jour dans les sous-sols d’une librairie de Scollay Square, vieux quartier en péril du Boston des années 1960. Plein d’appétit pour les mots, épris de nourritures spirituelles autant que terrestres, Firmin ne peut communiquer tous ses coups de coeur ni exprimer ses détresses, et voit avec révolte se déliter sa race comme son quartier, cernés par l’incompréhension des hommes et par les mécanismes du profit. Mais la rencontre avec un romancier marginal le sauve du pessimisme ambiant. Superbe hommage aux valeurs de l’écrit et aux singularités de toutes espèces, l’aventure de Firmin est aussi un fabuleux trait d’union entre littérature, exclusion et résistance.

Mon avis

Malheureusement, une lecture que je n’ai pas apprécié.

Firmin est un rat de librairie. En effet, né dans les sous-sols d’un bâtiment, il découvrira qu’il s’agit d’une librairie tenue par un dénommé Norman. Il apprendra aussi qu’il se trouve à Boston, dans les années 1960 et plus particulièrement dans le quartier de Scollay Square. Dernier d’une fratrie de 13 rat, Firmin est malingre, lutte pour survivre. Il est le seul à être né les yeux ouvert et à développer son intelligence. Toujours affamé, Firmin va chercher sa nourriture ailleurs que les mamelles maternelles, il découvre alors un livre et le grignote. Mais quand il découvre qu’il arrive à comprendre les titres des rayonnages, des livres et ensuite ce qu’il mange, son appétit vital dévorant se transforme en appétit de mot. Et Firmin lit plus qu’il ne dévore.

Progressivement, ses frères et sœurs vont partir s’établir à l’extérieur mais Firmin lui va rester dans la librairie et en faire son petit univers. Firmin se livre à nous à la fin de sa vie et nous raconte comment tout à commencer, comment il passait ses journées entre les livres mais aussi à la recherche de nourriture dans les rues et le cinéma de quartier. Comment il s’est découvert et comment il se perçoit. Il ira de déconvenues en déception sur les humains et leurs possibilités, eux qui peuvent s’exprimer, se rebeller, pleurer ou rire, ne font cependant rien pour améliorer leur existence. Alors que lui, qui ne le peut, le voudrait tellement.

Je n’ai pas su apprécier cette lecture, principalement, parce que je ne me suis pas attachée à Firmin, trop bavard. Et puis, je crois que je n’avais pas envie d’une histoire si déprimante. Et je me suis vraiment ennuyée. Alors, ce n’est que mon avis, je pense qu’on peut adorer cette lecture et je peux comprendre pourquoi. L’auteur y dépeint la déchéance d’un quartier, les difficultés sociales. Quoi de mieux qu’un rat pour observer ce qui se passe. Il est présent, discret et mobile. Il voit le quartier péricliter. Et puis, il est intelligent, il réfléchit et se pose des questions. Il essaie de comprendre ce qui arrive aux gens et à la ville. Mais aussi, il parle beaucoup de lui, des choses qu’il comprend sur Norman, qu’il comprend sur lui-même, sur la vie. Le roman aborde aussi sa volonté de communiquer. Sa condition de rat l’en empêche et cela le rend malheureux. Il aimerait tant partager ce qu’il lit, découvre, aime ou déteste. L’existence de Firmin reste néanmoins celle d’un rat même s’il cherche à faire comprendre aux gens qu’il n’est pas un rat comme les autres. Il doit se nourrir, affronter ceux qui ne supportent pas les rats en ville et les dangers inhérents. Il parcourt la librairie, fini par en connaître autant que le libraire. Et chercher à se faire connaître de lui. Mais rien n’est facile pour un rat.
Un autre personnage fait son apparition dans l’histoire de Firmin, Jerry un écrivain qui ne parvient pas à percer. Ce personnage saura-t-il rendre à Firmin un peu sa foi en l’humanité ? En tout cas, Jerry est un personnage que j’ai apprécié. J’ai préféré la partie du récit qui le concerne dès que Firmin fait sa connaissance quand il est encore à la librairie. Surtout, j’ai apprécié les synopsis de ces romans, un effet miroir sur la société, un exercice de style de l’auteur, très sympathique.

L’auteur en profite pour transmettre son amour de la littérature, des chefs d’œuvre littéraires, des mots, des écrits. Cependant, même si c’est très bien fait, intégré au récit de la vie de Firmin, il y a beaucoup de références littéraires, la plupart je suis passée à côté ne les connaissant pas. C’est souvent mon problème avec ce type de récit américain ou anglais, il y a beaucoup trop de choses que je ne connais pas et je trouve que c’est un peu handicapant. Cela empêche d’être émerveillé par le talent de l’auteur. Et à la place, je m’ennuie. Autre point, Firmin développe une imagination fertile faite à partir de ce qu’il lit, voit, de ce qui l’entoure. Il « se fait des films », vit dans sa bulle, pour adoucir, alléger son existence. Il part souvent dans des trips que j’avoue avoir, sinon parfois eu du mal à suivre, à trouver nécessaire.

L’auteur produit un roman qui amène à réfléchir sur nos choix mais surtout sur la vie et la fugacité de l’existence. Il y a vraiment beaucoup de bon, de ce point de vue, dans le récit. Mais cela n’a pas suffit à m’accrocher et à me charmer. Je ne retiens qu’un ennui persistant et c’est bien dommage. Je ne saurais dire si c’est l’histoire ou sa construction qui ne m’a pas convaincue. L’écriture de Sam Savage est riche et travaillée, avec de longues phrases. Beaucoup de références, un vrai travail sur le quartier de Boston et de vraies anecdotes de la vie de l’écrivain. Firmin est un récit mêlé de nostalgie et de mélancolie, une peinture amer et acide de la déchéance d’un quartier, d’idées, de valeurs, qui ne sombre pas dans le pathétique. Je pense qu’il lui manque peut-être pour me plaire un peu d’humour même noir.

Ce texte, un peu inclassable, original et mélancolique, a trouvé son public et le trouvera encore j’en suis sure mais ce n’était pas fait pour moi. Et vous, vous l’avez lu ? Vous en avez pensé quoi ?

Il est de retour de Timur Vermes

9782714456090

Belfond, 19,33€, 363 pages

4ème de couverture

Succès inouï en Allemagne, traduit dans trente-cinq langues, bientôt adapté au cinéma, Il est de retour est un véritable phénomène. Entre Chaplin, Borat et Shalom Auslander, une satire aussi hilarante que grinçante qui nous rappelle que face à la montée des extrémismes et à la démagogie, la vigilance reste plus que jamais de mise.

Soixante-six ans après sa disparition, Hitler se réveille dans un terrain vague de Berlin. Et il n’est pas content : comment, plus personne ne fait le salut nazi ? L’Allemagne ne rayonne plus sur l’Europe ? Depuis quand tous ces Turcs ont-ils pignon sur rue ? Et, surtout, c’est une FEMME qui dirige le pays ?
Il est temps d’agir. Le Führer est de retour et va remettre le pays dans le droit chemin. Et pour cela, il lui faut une tribune. Ça tombe bien, une équipe de télé, par l’odeur du bon client alléchée, est toute prête à lui en fournir une.
La machine médiatique s’emballe, et bientôt le pays ne parle plus que de ça. Pensez-vous, cet homme ne dit pas que des âneries ! En voilà un au moins qui ne mâche pas ses mots. Et ça fait du bien, en ces temps de crise…
Hitler est ravi, qui n’en demandait pas tant. Il le sent, le pays est prêt. Reste à porter l’estocade qui lui permettra d’achever enfin ce qu’il avait commencé…

Résumé

Par un bel après-midi ensoleillé, Hitler se réveille sur un terrain vague à Berlin. Il tombe d’abord sur la jeunesse berlinoise qui ne semble pas le reconnaitre. Hitler se dirige alors vers les rues plus animées et tombe sur un kiosque à journaux. C’est là qu’il découvre qu’il s’est réveillé en aout… 2011. 66 ans ont passé depuis ses derniers souvenirs. Le kiosquier lui propose son aide, le prenant pour un acteur qui cherche à percer et le garde quelques jours dans son kiosque. L’occasion pour le Führer de lire un peu ce qu’il se passe de nos jours et de décider que la Providence lui accord une nouvelle chance d’achever ce qu’il avait commencé.

Mon avis

Satire perturbante, exercice intéressant.

Voici donc Hitler qui se réveille 66 ans après sa disparition en avril 1945. Il n’a pas de souvenir de sa dernière soirée et c’est très surpris mais somme tout assez ravi qu’il se trouve être de nouveau là en 2011. Il découvre alors ce qu’il s’est passé depuis 1945, ce qu’est actuellement la politique allemande et c’est tout naturellement qu’il décide de reprendre s’il le peut son combat politique. Cependant, alors qu’il affirme partout s’appeler Adolf Hitler, il n’a pas la possibilité de prouver son identité, les gens qu’il rencontre opte pour le considérer comme un artiste, un acteur qui se fait passer pour le Fürher. C’est un orateur et sa façon de faire « comme le vrai » impressionne. On lui propose alors quelques minutes dans un show tv où il pourra dire ce qu’il veut, le contraste provoquant le rire. La télévision lui donne alors une vitrine inespérée.

Une première chose m’a gênée, c’est l’acceptation rapide du personnage de sa situation si inattendue. Il argumente que c’est la Providence sans finalement remettre en cause quoique ce soit. J’ai trouvé cela un peu trop simple. Il nous faut, lecteurs, accepter ce fait. Le Destin a voulu son Retour. Seconde chose, j’ai été mal à l’aise avec une narration à la première personne. Cette façon fait qu’on se sent intime avec les pensées de cet homme. Et là, vraiment ce fut compliqué pour moi. Je pense que l’auteur a fait ce choix justement pour nous faire réagir, c’est réussi. C’est perturbant de lire ce récit, en tout cas pour moi.

Il s’agit là, sinon, d’une très bonne satire. Car tout semble se passer si simplement. Comme si personne à notre époque n’allait vraiment réagir. On voit ce que l’on veut voir. Un acteur très doué. Un sosie qui se sert de sa ressemblance pour faire passer des messages. Mais le fait que les gens « marchent », ne semble pas plus intrigué, qu’ils ne réagissent pas vraiment… Fait froid dans le dos. Parce que ce n’est pas un comique burlesque, c’est vraiment le chef du Reich et les gens l’écoutent, le félicitent, s’attachent à lui, enfin à celui qu’il pense être. En fait, c’est assez compliqué à expliquer, pour le coup, il faut vraiment le lire pour le comprendre.

Il est intéressant de voir comment Hitler découvre les « nouvelles technologies et voies d’information ». La radio, la télévision, internet. Tous ses médias, qui vont lui permettre de faire entendre sa voix. Encore plus que dans les années 30. L’auteur réussit très bien à critiquer et faire réfléchir sur la télévision et les programmes. Adolf passe en revue les chaines et se rend compte qu’il n’y a pas vraiment de choses intelligentes dans les programmes de l’après-midi. Les gens veulent du divertissement. Mais finalement, le peuple regarde la vie de leurs contemporains pathétiques.

Il y pas mal d’humour noir, de quiproquos, de dialogues à double sens, du fait que les gens pensent que le Führer est un comédien. La façon de faire permet d’alléger les moments où on a les propos/ idées d’Hitler. Car lui parle le plus sérieusement du monde. Son talent oratoire lui permet de retourner toutes les situations à son avantage, derrière mon livre, ça m’a beaucoup énervée. Et j’attendais avec impatience, le moment où la situation allait se retourner. Je vous laisse découvrir si cela a été ou non le cas. J’ai eu du mal à le lire, je dois l’avouer.

Comme avec la télévision, Hitler découvre la politique nationale et internationale menée pendant les 66 dernières années grâce à Internet. En presque 70 ans, la position de l’Allemagne n’est plus la même, les préoccupations ont changées. Il en ressort atterré et il doit changer tout ça. Il rêve de retrouver l’Allemagne d’autrefois, et même si cela semble moins pressant, elle doit retrouver son envergure d’autrefois. Il doit faire quelque chose, il commence alors, le succès de ses passages à la télé grandissant, sa propagande. Jusqu’au jour où il dispose de sa propre émission…

J’ai trouvé certains passages un peu long. Peut-être parce qu’il a certaines choses historiques ou des thèmes que je ne connaissais pas. Que je n’ai pas non plus, une vision claire de la politique allemande actuelle. Mais on sent que l’auteur essaie de dénoncer des choses actuelles, le retour d’un nationalisme qui effraie, des personnages politiques peu charismatiques, des programmes inexistants. Il fait passer des messages.

Le roman et la façon de faire sont très intéressants. C’est bien écrit et servi par une réflexion poussée et intéressante. Mais j’ai besoin d’être en empathie avec un minimum de personnage pour aimer un livre. Et là, clairement ce n’était pas possible. Il y a tout le passif que l’on ne peut oublier et les idées qui me font hérisser le poil, qui me révolte. Il faut le lire parler des juifs, des femmes,… ahhhh. L’auteur réussit à faire réfléchir, réagir son lecteur, (éveiller les consciences ?) et c’est certainement ce qu’il voulait. Pour cela, je pense que ce roman est réussi. Pour le reste, c’est bien trop personnel, subjectif. Même si c’est vu le comique de contraste, de situation, l’humour noir, ça ne m’a malheureusement pas fait rire. Ce n’est pas un roman pour moi mais l’avoir lu m’a fait réfléchir et c’est déjà positif.